Un peu comme dans Astérix et Obélix dont le village, entouré de pilotis, est le seul à résister à la toute puissance romaine, des fois, en marchant dans mon village, je me dis que ce dernier doit être le seul à résisterà (heureusement) quelques exceptions prèsà la toute puissance du bon goût!

Vous pensiez  avoir touché le fond quand dans de précédents articles (ici et ici), j’avais esquissé un portrait pas vraiment éloigné de la réalité des autochtones qui peuplent les environs? Eh bien, signez-vous directement, brandissez votre crucifix ou partez dare-dare à tous clics de souris car, OUI, il y a bien pire et cette monstruosité visuelle qui fait encore plus de ravages que la Lèpre et le Choléra en leur temps et qui hérisse les quelques poils qui ornent ma silhouette ne semble pas en rémission: les prothèses ongulaires (dites « faux ongles »)!

Oui, parce que si Sainte Roitfeld lâche des citations comme « Les ongles sont le nouvel accessoire de cet hiver 2010« , apparemment, le décodeur modesque fourni dans la région ne semble pas être très bien paramètré dans la mesure où, manifestement, ici, l’information s’est transformée en « Colle-toi de la résine taille XXL et tu seras une modeuse à l’influence XXXL« .

Si Karl Lagerfeld, à coups de – nombreusesbagues et Daphne Guinness, à grand renfort de pierres précieuses, d’armure et de cailloux coûtant un os, peuvent se vanter de pouvoir transformer leurs mains en bijoux hors de prix, porter des palettes au bout de chaque doigt ne les rendra jamais plus beau, qu’on se le dise. Ainsi, pour éviter à celles qui auraientDieu du ciel, je n’arrive pas à l’écrire! – songé à se faire poser ces choses, je vais tâcher de les en dissuader en évoquant les 4 aspects à prendre en considération avant de sombrer dans cette démence collective

1) L’aspect visuel: Flanquée de ces bouts de résine au bout de chaque doigt, vous arpentez les rues de votre bourgade avec désinvolture quand, soudain, au détour d’une allée, vous vous rendez compte que des adolescents aux hormones en ébullition vous dévisagent avec insistance. Pleine d’entrain, de confiance et persuadée qu’ils vous prennent pour la sublime Anja Rubikfallait pas que votre collègue vous le dise un jour, depuis, vous y croyez dur comme fer! -, vous vous dirigez vers eux et après une brève conversation vous vous apercevez qu’ils vous prenaient pour Shauna Sand à cause de vos manucures similaires. Illico presto, vous googlelisez cette bonne femme et dans le quart de seconde qui suit, vous vous arrachez à coup de dents ces choses qui vous rapprochent plus d’une pornstar que d’une fille bience que vous êtes, cela va sans dire.

2) L’aspect pratique: Après avoir passé une journée harassante au bureau, à tentervainementde pianoter successivement sur le clavier de votre iMac et sur celui de votre Blackberry avec 10 bons centimètres de fake au bout des doigts, c’est au bord du suicide que vous rentrez chez vous où vous retrouvez avec plaisir et excitation votre Jules du moment, toujours partant pour une partie de galipettes. Sauf que voilà, après avoir terminé la soirée aux urgences parce qu’au cours de vos ébats vous lui aviez transpercé l’épiderme dorsal avec vos ongles ET qu’il n’ait manqué de se vider de tout son sang quand, pleine de bonne volonté, vous avez entrepris de lui masser les cervicales – dites merci à la carotide –, sans hésitation, vous avez programmé une intervention chirurgicale pour retirer ces implants plus dangereux qu’élégants.

3) L’aspect économique: Chouette, vous venez de découvrir, à la suite d’une série de clics frénétiques et totalement incontrôlés, quelques visuels de la nouvelle collection été 2011 de Christian LouboutinPrête à dégainerà la vitesse de la lumièrevotre carte bancaireet réprimant des cris orgasmiques d’allégresse qui seraient susceptibles de choquer vos voisinsafin de dépenser les 650 euros moyen d’une paire de 14 sortant vaguement des sentiers battus, votre euphorie sombre comme la carrière d’Hélène Ségara quand vous vous rendez compte que vous venez de claquer ces derniers mois une somme conséquente pour la pose, l’entretien (= la repousse de votre véritable ongle) et les litres de vernisChanelnécessaires pour peinturlurer la totalité de la surface des palettes résinées qui ornent désormais vos mains. Louboutin ou mains de catins, le choix n’aura pas été douloureux et vous vous êtes jurée de ne plus JAMAIS retomber dans ce gouffre financieret stylistique!

4) L’aspect douloureux: Les bébés, vous adorez ça (puis d’abord, être une femme et dire qu’on déteste ces choses, cela ne se fait pas, c’est socialement et politiquement incorrect de le revendiquer, c’est bien connu! Ne vous conditionne-t-on pas à être mère depuis votre tendre enfance?) et en bonne marraine la fée, vous acceptez de garder le récent mouflet de votre copine Cunégonde. Trois vomis plus tarddont un sur une de vos robes Marchesa (la pauvre a eu l’imprudence de se trouver en pleine ligne de tir) – et la poupée vivante s’attaque avec fougue à l’arrachage de vos faux ongles. Torture de niveau 100 (sur une échelle allant jusqu’à 10)! Réprimant l’envie de hurler et de le défenestrer -, vous choisissez de vous accorder quelques instants lors de la sieste du fils de Satan pour arracher vous-même les prothèses auxquelles il ne s’est pas encore attaqué. 50 litres de larmes plus tard, vous êtes désormais une nouvelle femme qui ne craint plus rien ni personne et vous aimez ça! (Vous songez d’ailleurs à vous rendre à l’administration communale pour faire légaliser votre nouvelle identité de Wonder Woman!)

En considération de ces aspectset pour que je n’aie pas envie de me crever les yeux à chaque fois que j’en vois (même si je respecte les choix de chacun! Ceci n’étant que MON avis) -, j’espère que troués, cloutés, XXL, décorés, ou peu importe, vous abandonnerez le TOC pour du CHIC et du CHOC

Très cordialement,

Monsieur de Vos (selon lequel, les ongles des femmes devraient se porter rouge – ou noir – et d’une longueur comme celle reprise sur ses dessins…)

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Légende: Chapeau de plumes, perles et cornes: MOUTON COLLET (été 2011)/Manteau en fourrure: DOLCE&GABBANA (hiver 2009)