Paris, le dimanche 08 mars 2009, un ciel pluvieux, l’Espace Ephémère Tuileries, 10 heures, le défilé KARL LAGERFELD n’a toujours pas débuté et l’entrée, précieusement gardée – à l’instar des forteresses médiévales – par toute une clique de vigiles stylisés ainsi que par des membres de l’équipe de presse, … reste toujours inaccessible.

Derrière cette barrière humaine, nettement plus dissuasive que les séparations – quelques peu hiérarchiques et étiquetées – du même nom, des arbres imposants de nudité définissent le long d’une large allée de terre, un espace de transition avant la tente proprement dite.

Devant l’entrée une élégante longue liane frangée juchée sur des sandales à talons de 12 cm minimum, membre manifeste de l’équipe « presse », fume cigarette sur cigarette en écoutant attentivement les directives qui crépitent à travers le haut parleur de ce qui semble être un talkie-walkie.

Depuis une petite vingtaine de minutes, je savoure avec délectation l’instant présent et me complais dans l’observation admirative de cet univers particulier, finalement assez proche de celui d’un cirque itinérant, que constituent les défilés de mode ainsi que les singulières créatures qui le peuplent. C’est vrai quoi, tant qu’à devoir attendre, autant en profiter pour jeter un coup d’œil autour de soi non… ?

Il faut dire que depuis que je suis arrivé – en avance, en panique totale, la peur du retard chronique omniprésente le long du trajet menant au Jardin des Tuileries, leStarbucks avalé en toute hâte puis engouffré dans la plus proche poubelle, … – la meute fashion-esque a commencé à affluer à une vitesse proche de celle à laquelleVictoria Beckham agrandit sa collection – déjà impressionnante – de Birkin‘s. Résultat, j’ai vite fait de me retrouver cerné par un nombre impressionnant d’individus – célèbres ou non – dont le style est délibérément affirmé. A quelques mètres de moi, Lou Lesage, dans un plus pur style « parisienne-bobo-chic » prend la pose et s’illumine sous le nombre affolant de flashs qui assiègent, de lumières artificielles, sa petite personne habilement mise en valeur par des collants blancs brodés, une robe baby-doll de couleur identique, une veste noire, une pochette en cuir brun tendre, des sandales aériennes et un bandeau-bijoux au prix probablement faramineux calé sur la tête.

Autour de moi, j’entends de l’anglais, de l’allemand, de l’italien, du français et ce mélange d’accents, de voix, d’intonations me plaît – pourquoi partir en Erasmusquand des occasions comme cela se présentent?

Soudain, une voix à l’accent anglais prédominant peste contre l’un des responsables des entrées. Je regarde dans la direction du son: c’est Hilary Alexander du Daily Telegraph qui lâche nonchalamment, d’un mouvement de frange lissée, au vigile impuissant, un « Karl wouldn’t be pleased if he knews! » retentissant. Deux minutes plus tard, après l’intervention d’une certaine Caroline – manifestement assez populaire ce jour-là, à en juger par le nombre incalculable de fois où des dames en fourrure l’ont interpellée pour entrer avant la foule de masse … – elle – et son escorte – entre en trombe sous le chapiteau.

Ensuite, un peu plus d’une heure après l’heure initiale du show, les choses s’accélèrent et, après avoir aperçu une Babeth Dijan de Numéro » resplendissante en sequins et pilotes noires sur le nez, une Virginia Smith, souriante, patiente et aimable, ouvrir la marche du Vogue U.S.A., c’est une Emanuelle Alt sombrement vêtue qui arrive précipitamment, à quelques centimètres de moi, probablement à titre d’éclaireuse, suivie dans la foulée par une Carine Roitfeld, plus blonde – et svelte – que jamais, à l’allure so 80’s en trench-coat caramel aux épaules accentuées (une tendance qui n’est pas proche de s’estomper dans les mois à venir) et en bottesMargiela zippées sur l’arrière et à talons vertigineux conceptuels en clou – déjà portée à la précédente fashion week, chez Givenchy, entre autres – et par d’autres personnalités du Vogue Paris, …
Les flashs aveuglants mitraillent le moindre de leurs mouvements, tentent de fendre la foule pour les poursuivre. Aux abords de l’allée d’accès au lieu du défilé, une silhouette si frêle qu’elle pourrait se briser si elle tombait avec ses magnifiques « open booties » en cuir noir aux talons flirtant avec les cieux, prend en charge l’entrée de certaines personnes et les guide par le biais de son Blackberry Bold – un accessoire commun et indispensable ici – vissé à l’oreille, elle-même soutenant des lunettes brunes fumées à monture imposante. Ses cheveux sont couverts par un de ces énormes bonnets en laine à grosses mailles brun foncé dont toute la classe réside en la façon méticuleusement mathématique de le poser sur son crâne.

Les prêtresses de la mode installées en fonction de leur rang et de leur importance dans le milieu, la plèbe « mode-esque » s’en suit et peut enfin pénétrer dans l’antre de l’Homme au Catogan, invitations uniquement, cela va de soi…

(A suivre…)